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Quand le juge écoute son cœur : l’intime conviction en question

Quand le juge écoute son cœur : l’intime conviction en question
Par Ismail Abakar 27.04.2023 • 12:23

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L'intime conviction du juge est un principe fondamental du droit pénal. Il signifie que le juge doit se prononcer sur la culpabilité ou l'innocence d'une personne en se fondant sur sa conviction personnelle, sans être lié par des règles de preuve formelles. Le juge doit apprécier librement les faits et les éléments de preuve qui lui sont soumis au cours du procès, qu'ils soient oraux, écrits, techniques ou psychologiques. Il doit se forger une opinion intérieure, en son âme et conscience, après avoir examiné attentivement les arguments de l'accusation et de la défense.
L'intime conviction du juge est définie par l'article 353 du code de procédure pénale français comme « la conviction personnelle du juge, qui peut s'écarter des règles de preuve et qui s'impose à lui en conscience ». Elle est le fruit d'une démarche intellectuelle et émotionnelle, qui prend en compte les éléments du dossier, les arguments des parties, les débats à l'audience, mais aussi l'intuition, le ressenti, la sensibilité du juge. L'article 427 dispose que "hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d'après son intime conviction". L'article 353 précise que "le président pose à la cour et aux jurés cette question : « Avez-vous une intime conviction ? »" et que "la cour et le jury doivent répondre affirmativement à cette question pour pouvoir déclarer l'accusé coupable".

En fait, il s'agit d'une notion qui remonte à la Révolution française, qui a voulu rompre avec le système de la preuve légale de l'Ancien Régime, fondé sur des présomptions irréfragables, des témoignages privilégiés ou des aveux obtenus sous la torture. Elle s'inspire des idées des philosophes des Lumières, comme Beccaria, qui ont plaidé pour un procès pénal plus respectueux des droits de l'homme et de la dignité de la personne. Elle repose sur l'idée que le juge est un être humain doté de raison et de sensibilité, capable de se faire une opinion personnelle sur la vérité des faits.

L'intime conviction du juge présente des avantages et des inconvénients. D'un côté, elle permet au juge d'adapter sa décision au cas particulier qui lui est soumis, en tenant compte de la personnalité de l'accusé, des circonstances du crime, des éléments de preuve disponibles et des arguments des parties. Elle lui donne une certaine marge de liberté et de créativité dans son appréciation des faits. Elle favorise aussi le dialogue entre le juge et les jurés, qui doivent confronter leurs opinions et se convaincre mutuellement. Elle respecte enfin le principe de la présomption d'innocence, en n'exigeant pas du juge qu'il condamne une personne s'il subsiste un doute raisonnable sur sa culpabilité.

D'un autre côté, l'intime conviction du juge peut présenter des risques d'arbitraire, d'erreur ou d'injustice. Le juge peut en effet être influencé par ses préjugés, ses émotions, ses sympathies ou ses antipathies personnelles. Il peut aussi être trompé par des faux témoignages, des expertises biaisées ou des pièces falsifiées. Il peut enfin être soumis à des pressions extérieures, comme l'opinion publique, les médias ou les autorités politiques. L'intime conviction du juge n'est donc pas une garantie absolue de vérité ou d'équité. Elle doit être encadrée par des règles de procédure et de déontologie, ainsi que par le contrôle des voies de recours.

En conclusion, l'intime conviction du juge est un principe essentiel du droit pénal, qui repose sur la confiance accordée au juge pour apprécier les faits et les preuves selon sa conscience. Elle permet au juge de rendre une décision adaptée au cas concret qui lui est soumis, mais elle comporte aussi des risques d'erreur ou d'injustice. C'est pourquoi, ce principe de droit pénal doit être encadrée et contrôlée. Le juge doit respecter les principes du procès équitable, comme la présomption d'innocence, le contradictoire, la motivation des décisions. Il doit aussi être capable de remettre en question sa conviction, de la confronter à celle de ses collègues, de la soumettre au contrôle des juridictions supérieures. Il doit enfin être conscient de ses responsabilités et de ses devoirs, car sa conviction peut avoir des conséquences graves sur la vie des personnes qu'il juge.

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