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Documentation / Jurisprudence Tchadienne / Premières Instances



REPRTOIRE N° 229/15 DU 03/11/2015 - TGI DE N'DJAMENA - JUGEMENT CIVIL



REPUBLIQUE DU TCHAD
COUR D’APPEL DE N’DJALMENA
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE N'DJAMENA
REPERTOIRE N° 229/15
DU 03/11/2015
JUGEMENT CIVIL

AFFAIRE: AHN X, MHN X et autres
Contre : MRT Y, MHR Y et autres
Objet : REVENDICATION IMMOBILIERE

A l’audience publique du Tribunal de Grande instance de N’Djamena, siégeant en matière civile et coutumière, et en premier ressort, tenue dans la grande salle des audiences du palais de justice de ladite ville le 03/11/2015 par :

YM, Président ;
Assisté de Me DAL, Greffier ;
En présence de DN et MR, Assesseurs ;
Et YI, interprète ;
Il a été rendu le jugement dont la teneur suit :
Entre
AHN X, MHN X et autres demandeurs comparant, ayant pour conseil cabinet BBA,
D’une part
Et MRT Y, MN et autre, défendeurs comparants, ayant pour conseil cabinet ART
D’autre part
Sans que les présentes qualités ne puissent nuire ou préjudicier les droits et intérêts des parties en cause, mais au contraire sous les plus expresses réserves de fait et de droit.

I) FAITS ET PROCEDURE

Les sieurs AHN X, MHN X, ALHN X, IHN X, AOR, HBM, OHN X, ZHN X, HHN X, MHN X, IHN X ont acquis chacun cinq (05) hectares de terrain des mains du chef du village ADJ dans le village FoulgaIIdans la sous préfecture de N’Djamena Farah depuis 2002. En 2011, ils ont obtenu les arrêtés préfectoraux afférents à leurs parcelles portant location rurale ;
Cependant, MRT Y, MN, MBR, ABR, MMT, MAK et IDR sont venus occuper ces terres nouvellement acquises empêchant les acquéreurs de les mettre en valeur.
Ainsi, par requête introductive d’instance en date du 31/3/2014, les nommés AHN X et autres ont attrait MRT Y et 6 autres devant le Tribunal de céans afin qu’ils soient déclarés légitimes propriétaires de leurs parcelles sises au village Foulga II, canton suburbain, dans la sous préfecture de N’Djamena Farah et ils sollicitent la condamnation des défendeurs à leur payer cinquante millions (50.000.000) de francs CFA à titre de dommages et intérêts ;
Quant aux sieurs MRT Y et six (06) autres, ils sollicitent reconventionnellement que le Tribunal les déclare légitimes propriétaires de leurs parcelles respectives sises à FoulgaDollé et qu’il condamne solidairement le chef de village ADJ, AHN X et autres à leur payer la somme de soixante dix millions (70.000.000) de francs CFA de dommages et intérêts

II) DISCUSSION

A) Sur la propriété des parcelles

Attendu que ADJ a été régulièrement nommé chef de village FoulgaDollé ; qu’après être irrégulièrement relevé de ses fonctions, il saisit la Cour Suprême qui, par décision N° 006/KIIL/DHB/SP-NDJ/2012 l’a réhabilité ; que ces terres qu’il a vendues aux requérants ont toujours appartenu à ses descendants et il permettait que ses administrés les exploitent ;
Attendu que par l’effet de cette vente, AHN X et autres sont devenus les véritables propriétaires de ces terrains ; que l’article 544 du code civil dispose que : « la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois et règlements ;
Attendu que le jugement répertoire N° 265/07 du 26/02/2007 rendu contre HAHN X et autres portant sur une parcelle différente que celle objet de la présente instance ; que le 11 Juillet 2013, MRT Y, et MN nommés MA CK et CK MO avait amiablement trouvé une solution en prêtant serment sur le Saint Coran pour reconnaitre la qualité de légitime propriétaire des terres à ADJ ; que d’ailleurs l’article 2 de l’ordonnance N° 007/70 du 06 Mai 1970 portant attribution des chefs traditionnels de certains pouvoirs en matière judiciaire dispose que s’il y a conciliation, le chef conciliateur fera dresser un procès verbal de constatation de l’arrangement, ce procès verbal sera signé par lui son secrétaire, les deux parties et éventuellement les notables qui auront participé à la conciliation, ce procès verbal aura pour les parties valeur de jugement ; qu’en l’espèce le procès verbal de conciliation est devenu définitif car il n’a été attaqué par aucune des parties ;
Attendu que les défendeurs arguent par l’entremise de leur conseil, le cabinet ART qu’ils étaient les exploitant agricoles de ces parcelles depuis belle lurette ; que plus de trente ans qu’ils occupent ces parcelles avec la présence constante d’ADJ ; que l’article 16 de la loi N° 24 du 22 Juillet 1967 relative au régime de la propriété foncière au Tchad dispose que tous les droits coutumiers sont prescrites par dix (10) ans de non exercice ; qu’il n’y aucune cause d’utilité publique pour qu’ils cèdent leurs parcelles ; que l’article 1er de la loi N° 25 du 22 Juillet 1962 sur la limitation des droits fonciers au Tchad énonce que nul ne peut être privé de la propriété des immeubles ou de l’usage du sol sans que l’intérêt public l’exige ; qu’il ait indemnisation et que les dispositions légales soient appliquées ;
Attendu qu’ADJ n’étant ni propriétaire des parcelles ni mandataire pour vendre leurs parcelles ; que conformément à l’article 1599 du code civil, la vente de la chose d’autrui est nulle, elle peut donner lieu à des dommages intérêts…
Mais attendu qu’il ressort du procès verbal de la descente sur les lieux du 22/5/2015 que lors de la vente des parcelles litigieuses aux concluants, les défendeurs étaient présents ; que depuis 2002, personne d’entre eux n’a osé contester cette vente ; que personne n’a tenté d’ester en justice pour son annulation ; que les défendeurs au lieu de s’attaquer à cette vente orchestrée par le chef du village ADJ propriétaire des parcelles cherchent plutôt à troubler la jouissance des nouveaux acquéreurs ; que s’ils sont véritablement propriétaires ils doivent s’attaquer à la vente ; que le fait d’exploiter une terre ne donne que le droit d’usus et du fructus et non le droit d’abusus ; que la vente étant valide, il y a lieu de déclarer AHN X et autres légitimes propriétaires de leurs parcelles sises à FoulgaDollé ;

B) Sur les dommages et intérêts

Attendu que les requérants sollicitent par l’entremise de leur conseil Maître BBA la condamnation des défendeurs à leur payer 50.000.000 de francs CFA de dommages et intérêts sur les fondements de l’article 1382 du code civil selon lequel « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par le fait duquel il est arrivé à le réparer » ;
Attendu que les défendeurs qui ont accepté la vente conclue entre le chef de village et AHN X et autres ne font que perturber la jouissance paisible de la propriété des requérants ; que par cet acte, ils leur causent un préjudice ; que des années durant, ceux-ci n’arrivent pas à jouir pleinement de leurs biens ; que pour réprimer ce comportement, il importe de faire droit à la demande en dommages et intérêts des demandeurs tout en l’appréciant à sa juste valeur.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard desparties en matière civile et coutumière et en premier ressort;
Sur la forme : Déclare l’action d’AHN X et autres, recevable
Au fond : Dit qu’elle est fondée ;
Donne acte au procès verbal de conciliation établi le 11/7/2013 entre le chef du village ADJ et, MACK et CKMO ;
Déclare AHN X, MHN X, IHN X, ALHN X, ZHN X, AOR, MHN XI, OHN, HBM, HAHN X, respectivement légitimes propriétaires des parcelles objets des arrêtés
N° 130/CHB/DOM/2003 ;
N° 548/CHB/DOM/2011 ;
N° 552/CHB/DOM/2011 ;
N° 449/CHB/DOM/2011 ;
N° 551/CHB/DOM/2011 ;
N° 553/CHB/DOM/2011 ;
N° 556/CHB/DOM/2011 ;
N° 555/CHB/DOM/2011 ;
N° 550/CHB/DOM/2011 ;
N° 558/CHB/DOM/2011 ;
N° 557/CHB/DOM/2011
sises au village Foulga 2, dans la sous préfecture de N’Djamena Farah ;
Condamne MHR Y, MN, MBR, ABR, MMT, MAK et IDR à leur verser la somme de vingt millions (20.000.000) de francs CFA à titre de dommages et intérêts ;
Les déboute du surplus de leur demande.
Condamne enfin les défendeurs aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique, les jour mois et an que dessus ;
Et après lecture faite, signent le Président qui l’a rendu et le Greffier.