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Documentation / Jurisprudence Tchadienne / Premières Instances




REPERTOIRE Nº138/15 du 30/06/2015 - TGI DE N'DJAMENA - JUGEMENT CIVIL



REPUBLIQUE DU TCHAD
COUR D’APPEL DE N’DJAMENA
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE N'DJAMENA
REPERTOIRE Nº138/15 du 30/06/2015
JUGEMENT CIVIL

AFFAIRE: AAB
Contre : L’ETAT TCHADIEN et MAB
Objet : RECLAMATION DE CREANCES et DOMMAGES-INTERETS

A l’audience publique du Tribunal de Grande instance de N’Djamena, siégeant en matière civile et coutumière et en premier ressort, tenue dans la grande salle des audiences du palais de justice de ladite ville le 30/6/2015 par :
YR, Président ;
Assisté de Me DAL, Greffier ;
En présence de MRB et BS, Assesseurs ;
Et YI, interprète ;

Il a été rendu le jugement dont la teneur suit :
Entre
AAB, demandeur comparant, ayant pour conseil cabinet BB,
D’une part
Et l’ETAT TCHADIEN et MAB, défendeurs non comparants,
D’autre part
Sans que les présentes qualités ne puissent nuire ou préjudicier aux droits et aux intérêts des parties en cause, mais au contraire sous les plus expresses réserves de fait et de droit.

I- FAITS ET PROCEDURE

Attendu que par requête introductive d'instance Nº1862/PT/NDJ/14 enregistrée au greffe du Tribunal de Grande Instance de N'Djamena le 24/07/2014, le sieur AAB a attrait l'Etat tchadien et MAB afin de les voir être condamnés à lui payer la somme de 20.228.160 francs à titre principal et 100.000.000 francs à titre de dommages-interêts
Attendu que sieur AAB, représente les héritiers de son feu frère AB décédé depuis le 07/06/1997;
Qu'avant sa mort, le de cujus avait laissé une facture relative à la fourniture de vivres à l'armée nationale en circuit dans les services des finances;
Qu'ayant fait tout le circuit nécessaire, ladite créance avait été payée entre les mains de sieur MAB qui n'était pas mandaté par la famille le 16/07/2002 de connivence avec les agents des services de l'Etat;
Attendu que pour répliquer, l'Etat tchadien par le biais de la Direction du contentieux civil a fait savoir que le nommé MAB avait bel et bien encaissé ladite créance mais en tant qu'héritier du de cujus sur présentation des pièces attestant sa filiation au de cujus;
Que si un des héritiers avait pu encaisser la créance ce n'est pas la faute de l'Etat mais que c'est au conseil de famille de régler la situation;

II- DISCUSSION

Attendu que conformément aux dispositions de l'article 1383 du Code Civil: «Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence»;
Qu'en l'espèce, les agents de l'Etat chargés d'éponger ladite créance avaient agi avec négligence et imprudence puisque n'ayant pas pris le temps de vérifier la personne indiquée pour entrer en possession de la créance;
Que les dispositions de l'article 1384 du Code Civil quant à elles précisent que: «On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre...»;
Qu'en l'espèce, d'après le conseil de famille, c'est sieur AAB qui a été désigné dans la procuration pour poursuivre et récupérer la créance et non MAB;
Qu'agissant ainsi au nom et pour le compte de l'Etat, les agents étatiques ayant servi de l’argent à MAB sans contrôle de son identité et de son acte de désignation comme réprésentant les héritiers de son feu frère, celui-ci doit répondre du dommage causé par le fait de ses agents ;
Attendu que conformément à l'article 1382 du Code Civil qui dispose que: «Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer»; Qu'en agissant ainsi, l'Etat et ses agents avaient causé un réel et énorme préjudice aux héritiers du de cujus, lequel préjudice doit être réparé;
Mais attendu que les défendeurs n’ont jamais comparu pour faire valoir leurs moyens de défense ; Que l’article 82 du code de procédure civile dispose que si le défendeur n’a pas comparu, ou si ayant comparu, il n’a pas produit de défense, le demandeur peut requérir le tribunal de lui adjuger le bénéfice de sa demande ; Que conséquemment, il convient de faire droit à la demande d’AAB tout en ramenant les dommages et intérêts à des proportions raisonnables ;
Que les parties ont été régulièrement convoquées et que seul le demandeur a comparu de telle sorte que le jugement sera contradictoire à son égard et par défaut contre les défendeurs;

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard du demandeur AAB et par défaut contre les défendeurs en matière civile et coutumière et en premier ressort;
Déclare recevable et fondée l'action du demandeur;
Condamne solidairement l'Etat tchadien et MAB à lui payer la somme de 20.228.160 francs à titre principal et 30.000.000 francs à titre des dommages et intérêts;
Le déboute du surplus de sa demande;
Ordonne la signification du présent jugement aux défendeurs;
Les condamne enfin aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique, les jour mois et an que dessus ;
Et après lecture faite, signent le Président qui l’a rendu et le Greffier.