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Documentation / Jurisprudence Tchadienne / Premières Instances




REPERTOIRE N° 168/15 DU 04/8/2015 - TGI DE N'DJAMENA - JUGEMENT CIVIL



REPUBLIQUE DU TCHAD
COUR D’APPEL DE N’DJAMENA
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE N'DJAMENA
REPERTOIRE N° 168/15
Du 04/8/2015
JUGEMENT CIVIL

AFFAIRE: Les Héritiers PD représentés par PP
Contre : AS, OC et 2 AUTRES
Objet : ASSIGNATION AU FOND EN REVENDICATION DE L’IMMEUBLE ET DOMMAGES-INTERETS
A l’audience publique du Tribunal de Grande instance de N’Djamena, siégeant en matière civile et coutumière, et en premier ressort, tenue dans la grande salle des audiences du palais de justice de ladite ville le 04/8/2015 par :

YM, Président ;
Assisté de Me DL, Greffier ;
En présence BS et KB, Assesseurs ;
Et de YI, interprète ;
Il a été rendu le jugement dont la teneur suit :
Entre
Les Héritiers PD représentés par PP demandeurs comparants, ayant pour conseil cabinet TN,
D’une part
Et AS, OC, HI et AB, défendeurs comparants ayant pour conseil cabinet MF,
D’autre part

Sans que les présentes qualités ne puissent nuire ou préjudicier aux droits et intérêts des parties en cause, mais au contraire sous les plus expresses réserve de fait et de droit.

I) FAITS ET PROCEDURE

Feu PB fut Commissaire divisionnaire durant le règne du Président FRANCOIS TOMBALBAYE. Suite au coup d’Etat militaire ayant conduit au renversement du premier Président du Tchad, le nouveau régime a pris une ordonnance pour confisquer les biens de certains collaborateurs du Président déchu au profit de l’Etat. Dans ce cadre plusieurs biens de PB furent confisqués. Cependant en 1991, une ordonnance de restitution de tous les biens confisqués a été prise aux fins de leur restitution aux anciens propriétaires suite à la conférence nationale souveraine, un décret d’application sera pris dans ce sens en 1993.
Malgré cela, la villa ITALEDIL voisine au Ministère de l’Economie et du plan est toujours occupée par le Général AS et autres ; Ainsi, le 14 Janvier 20015, les héritiers PD représentés par PP ont assigné devant le Tribunal de Grande instance de N’Djamena à comparaitre à l’audience du 20 Janvier 2015 les nommés AS, OC, HI et AA, afin que le Tribunal les déclare légitimes propriétaires de la villa ITALEDIL et qu’il condamne les défendeurs à leur verser cinq cent millions (500.000.000) de francs Cfa à titre de dommages et intérêts.

II) DISCUSSION

Attendu que les défendeurs sous la plume de leur conseil le cabinet MF ont conclu à l’irrecevabilité de l’action des héritiers PB en se fondant sur l’irrégularité de la saisine du Tribunal ; que pour eux l’article 41 du code de procédure civile dispose que : « les actions, en matière civile, qui tendent à faire reconnaitre ou protéger un droit, sont introduites soit par une requête, soit par une citation ; qu’une assignation au fond ne peut se substituer sans un autre texte de loi contraire à ce mode ordinaire de saisine du Tribunal civil ; que l’assignation par laquelle le Juge est directement saisi est une émanation du droit OHADA ; que les défendeurs arguent par l’entremise de leur conseil que les héritiers PD n’ont pas qualité pour ester en justice car leur acte de notoriété N° 0648/AB/2013 DU 29/10/2013 est délivré par un notaire ; que pourtant, la qualité d’héritier est prouvée par un acte de notoriété pour hérédité dûment dressé par la Juge et dont le caractère définitif et irrévocable est consacré par un certificat de non appel et de non opposition ; que de surcroit, la plupart des personnes dont les noms y sont citées ont des actes de naissance tchadiens sans rapporter la preuve de leur nationalité tchadienne en produisant leurs certificats de nationalité conformément à l’article 32 et suivants du code de la nationalité ; que les actes de naissance ne datent que seulement d’entre les 22 et 24 Octobre 2003 alors que les concernés sont nés pour la plupart entre les années 1960 et 1970 ;
Attendu que les assignataires soutiennent par le biais de leur conseil le cabinet TN que les défendeurs n’ont pas soulevé une fin de non recevoir dans leurs écritures et la qualité des héritiers est un débat clos devant le même Tribunal car ils ont produit une copie d’un de leur Jugement antérieur, Que le Tribunal ne peut que déclarer recevable l’assignation faite par les héritiers PB ;
Mais attendu que l’assignation à comparaitre n’est prévue par le code OHADA qu’en matière d’opposition à une ordonnance aux fins d’assignation à payer ou à restituer conformément aux articles 9 ; 10 ; 11 et 12 de l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution ; qu’en l’espèce nous ne sommes nullement dans ce cas de figure et l’assignation dont il est question n’est qu’une innovation procédurale sans base textuelle puisque le code de procédure civile tchadien en son article 41 ne reconnait que les exploits de citation et non les assignations ; que de surcroit, les actes de notoriété pour hérédité, les actes de tutelle sont des jugements gracieux qui sont de la compétence du Tribunal civil car ils sont établis par le Juge des actes désigné à cet effet qui vérifie les qualités des parties et les diverses pièces nécessaires avant d’accéder ou de rejeter leur demande ; qu’en cas de délivrance d’un tel acte, les parties ont un délai pour se faire délivrer par le Greffier en chef de la juridiction compétente, un certificat de non appel et de non opposition ; qu’en l’espèce l’acte émane d’un notaire qui n’est pas une juridiction devant qui les personnes s’estimant lésées par la délivrance de l’acte d’hérédité, peuvent user des voies de recours ; que de tout ce qui précède, il convient de déclarer irrecevable l’assignation au fond aux fins de revendication de l’immeuble et des dommages et intérêts faite par les héritiers PB pour vice de procédure et défaut de qualité.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard des parties, en matière civile et coutumière et en premier ressort;
Déclare l’assignation faite par les héritiers PD irrecevable ;
Les condamne aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique les jour mois et an que dessus ;
Et après lecture faite, signent le Président qui l’a rendu et le Greffier.